Entretien avec Bernard Duplaix

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Pouvez-vous nous parler de votre carrière dans la musique ?

Je suis saxophoniste poly-instrumentiste (flûtes, clarinettes, basson) qu'on dit adroit et précis. Un musicien pluriel aux multiples expériences, ancien Animal Triste du Grand Magic Circus de Jérôme Savary, familier des studios d’enregistrement et compagnon de scène et de route d’un grand nombre des plus célèbres chanteurs français de ces dernières décennies. Je m'intéresse exclusivement à tout !

Je n'aurais pas pu (pas su?..) vivre sans la Musique. Mon père jouait du violon. Ma tante tenait un dancing. J'ai passé des heures au pied de l'estrade, fasciné par les musiciens.

Ado, je suis allé au festival de Jazz d'Antibes en 1965, le saxophoniste John Coltrane était là. Je n'oublierai jamais la magie de sa sonorité... Ma décision était prise, je DEVAIS être musicien... Quelques années plus tard, je suis rentré au Conservatoire National Supérieur de Musique (CNSM) pour y suivre des études classiques pointues, en même temps que j’étudiais le Jazz à la Paris American Academy.

J’ai fait partie d’un groupe de Soul, assez populaire à l’époque : le Mayfair Group. Nous faisions les beaux soirs des clubs parisiens à la mode.  Cette musique fut une très bonne école pour le jeu en section, le phrasé, l’articulation. Pratiquant plusieurs musiques et plusieurs instruments, j’ai pu me permettre de choisir parmi les propositions. J’ai donc commencé à accompagner de jeunes chanteurs : Michel Delpech, Sylvie Vartan (mon 1er Olympia), Alain Chamfort, Herbert Léonard, Dick Rivers et des vieilles gloires du Music-hall

J’y ai pris goût, et par la suite j’ai toujours adoré accompagner des chanteurs sur scène. J’ai joué avec des artistes plus classiques mais très populaires tels : Annie Cordy, Georges Ulmer, Mireille Mathieu, Gilbert Bécaud, Charles Aznavour…Et puis surtout Johnny Hallyday et Claude François, deux personnages très différents l’un de l’autre, mais deux grands artistes proposant de véritables Shows.

J’ai travaillé également avec Thierry le Luron et Coluche pendant plusieurs années et aussi avec Demis Roussos qui était un type adorable.

Et puis il y a eu le travail en studio. C’était un de mes rêves ! Les musiciens de studio ne sont pas forcément connus du grand public mais tout le monde, un jour ou l’autre, a eu leur son dans l’oreille. J’ai beaucoup appris sur le plan musical et professionnel au contact des musiciens de studio.

Vous avez également enseigné ?

À un certain moment de ma vie, j’ai éprouvé le besoin de transmettre, de partager, d’essayer de redonner un peu de ce que mes différents professeurs m’avaient si généreusement fait découvrir! J’ai enseigné dans plusieurs écoles de Jazz parisiennes (IACP, ARPEJ, CIM) ainsi qu'aux Conservatoires de l’Haÿ les Roses et de Palaiseau où j’étais responsable du département Jazz et Musiques actuelles.

Comment est née votre collection de flûtes ? 

Coluche m’appelait « le collectionneur ». Oui, j’avoue, je suis un collectionneur de flûtes de marques françaises et surtout d’un facteur nommé Louis Lot. Ce personnage incontournable de la flûte moderne a traversé tout le 19° siècle. Lorsque j'ai rencontré Robert Hériché, il était un des seuls à jouer encore professionnellement une flûte Louis Lot. Je me suis intéressé à l'histoire de ce mystérieux Louis Lot dont je ne savais rien, puis à ses confrères. C'est alors que j'ai commencé à collectionner les flûtes françaises anciennes de différentes marques. Je me suis très vite rendu compte qu'on ne pouvait séparer la passionnante histoire de la facture instrumentale, de l'histoire de la grande École française de flûte. J'ai donc entrepris des recherches sur flûtes et flûtistes et j'ai concrétisé ces recherches par une série d'articles publiés dans diverses revues internationales.

bernard duplaixQu’est-ce qu’être un collectionneur de flûtes ?

Je m’emploie depuis des années, à rassembler et sauvegarder tout ce qui concerne les flûtes système Boehm de marques françaises en bois ou en métal sur une période de 1837 à 1960, ainsi que toute documentation, catalogues ou même simples renseignements concernant ces marques. J’ai été en 1987 l’un des fondateurs de l’ACIMV (Association des Collectionneurs d’Instruments de musique à Vent) qui regroupe des passionnés. Au cours des années, j'ai rassemblé des instruments des plus célèbres marques françaises. En premier lieu, ceux de la prestigieuse marque Louis Lot dont je possède maintenant la plus importante collection au niveau international : une centaine de modèles reflétant toute l'histoire de la marque de 1855 à 1951.

Pouvez-vous nous parler du ou des instruments que vous considérez comme vos plus belles pièces et nous dire pourquoi ? 

Ma collection est multiforme, j'ai donc plusieurs angles d'attaque pour désigner parmi toutes ces étranges beautés quelles sont les plus belles pièces. Les plus rares sont sans conteste ma Blotfroy (tube de Théobald Boehm, clétage et embouchure de Louis Lot et Hypolite Godfroy). Fabriquée en 1847, elle est l'un des 4 prototypes de la flûte moderne en métal à perce cylindrique. Mais j'ai aussi une rarissime flûte conique en bois d'Auguste Buffet Jeune de 1848, construite d'après le brevet de Victor Coche. Elle constitue vraiment le chainon manquant dans la gestation de la flûte moderne.

Le parcours et l'histoire personnelle de chacun de mes  instruments me fascine...

Les flûtes qui sont les plus chères à mon coeur ont appartenu à de grands représentants de l'École française de flûte : Louis Dorus, Paul Taffanel, Marcel Moyse, Adolphe Hennebains, Johannes Donjon, Louis Fleury, Léopold Lafleurance, Léon Fontbonne, Gaston Blanquart, Joseph et Jean-Pierre Rampal, Lucy Dragon, Robert Hériché, Fernand Dufrène et plusieurs autres...

Quels sont vos projets à venir, pour vous et votre collection ? 

Mes différents projets ne sont possibles que grâce à l'amitié et à la passion de différentes personnes. Ainsi, depuis plusieurs années, je confie régulièrement - à titre gracieux - des instruments pour des concerts ou des enregistrements.

En tout premier lieu, il y a ce rapport très particulier, qui m'unit à cet incroyable flûtiste, qu'est Alexis Kossenko. Il a su - plus que tout autre - redonner vie à plusieurs instruments de ma collection. Je ne l'en remercierai jamais assez.

Un autre de mes amis est Pierre Hélou. Avec ce jeune facteur de flûtes, aujourd'hui à la tête avec Rémi Caron de l'atelier Parmenon (Buffet-Crampon) nous avons entrepris un travail très particulier : l'étude à travers ma collection d'instruments Louis Lot de l'évolution de cette marque prestigieuse qui fut à l'origine des réalisations de toutes les grandes marques de flûtes traversières. Ce travail n'a été rendu possible que grâce à l'énergie, au talent intuitif tout autant que précis de Pierre, mais également au fait unique d'avoir pu rassembler autant d'instruments de ce célébrissime facteur. Le résultat sera mis à disposition de tout un chacun sur Internet, mais également concrétisé par la publication de mon catalogue par l'ACIMV.

Quant à ma collection et à son avenir, toutes mes archives rejoindront un jour la Bibliothèque Nationale, endroit d'où rien ne ressort et où, grâce à la numérisation, de nombreux documents passionnants sont facilement et internationalement disponibles.

Ma collection d'instruments qui, je l'espère bien, va encore s'enrichir de quelques instruments émouvants reviendra un jour à ma fille Camille, flûtiste amateur de talent qui -  j'en suis sûr - saura quoi en faire.

Avez-vous un souhait particulier?

Un souhait ? Oui, absolument, J'aimerais trouver une aide, une forme de mécénat pour faire restaurer quelques superbes pièces de ma collection qui dorment encore...

 Bernard Duplaix - Villerville - Janvier 2022

Contact

CSFI - Chambre Syndicale de la Facture Instrumentale

La Chambre Syndicale de la Facture Instrumentale regroupe sociétés et artisans qui fabriquent, réparent, restaurent, distribuent et exportent les instruments de musique.

9, rue Saint-Martin M° Châtelet
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