Le Nickel et les instruments de musique : Où en sommes-nous aujourd’hui ?
NEWS : Dernière mise à jour le 05 juin 2019
Le projet de guideline a été stoppé, la Commission européenne et l’ECHA ne parvenant pas à avancer avec cet outil.
La question du nickel n’est cependant pas résolue. Il est très probable que la réglementation du nickel en elle-même soit retravaillée puisque l’Union Européenne considère qu’elle n’est pas satisfaisante. L’élaboration d’une nouvelle réglementation va prendre du temps – au moins deux ans – et donnera lieu à des consultations des professionnels.
Des exemptions pourront être incluses et, si jamais la nouvelle réglementation doit impacter nos professions, des délais seront prévus afin que les entreprises aient le temps de se mettre en conformité.
La CSFI et son homologue européen la CAFIM continuent de suivre ce dossier de près afin de pouvoir informer les professionnels des prochaines évolutions.
Le nickel dans la facture instrumentale française et européenne
Du fait de ses propriétés, le nickel est utilisé dans presque toutes les familles d’instruments de musique. Son utilisation est intimement liée aux évolutions techniques qu’a connues la facture instrumentale depuis plusieurs siècles en Europe et participe à la qualité et aux sonorités de ces instruments. Le nickel ou ses alliages – tel que le maillechort, alliage de cuivre, zinc et nickel - se retrouvent par exemple dans les cordes et les frettes des instruments à cordes ou encore dans le clétage ou certaines parties des instruments à vent.
Le nickel est le métal le plus efficace pour lutter contre la corrosion ; il garantit donc la qualité et la longévité des instruments. Sa présence dans les cordes est par ailleurs indispensable au fonctionnement des instruments amplifiés.
Malgré les recherches, il n’existe aujourd’hui aucun autre métal qui puisse égaler ses qualités en facture instrumentale.
Or, il est impossible de certifier que les instruments de musique fabriqués et mis sur le marché en Europe ne dépasseront pas le seuil de 0,5 µg de nickel/cm²/semaine. D’autant plus que les résultats des tests effectués par les fabricants diffèrent d’un laboratoire à un autre – et ce, même si ces laboratoires suivent tous la même norme (EN 1811:2011 + A1:2015).
Il est par ailleurs certain que les cordes de guitares et basses électriques dépasseront ce seuil puisque la teneur en nickel de ces accessoires est très élevée.
L’inclusion des instruments de musique dans cette réglementation serait un coup terrible pour la facture instrumentale française et européenne. Parce que la réglementation REACH ne concerne pas seulement la mise sur le marché des objets, elle concerne également la fabrication de ces objets sur le sol européen.
Ainsi les grandes entreprises françaises seraient à la fois pénalisées pour la production qu’elles vendent au sein de l’Union européenne, mais également pour celle qu’elles vendent à l’étranger.
Il y a, par exemple, une production particulière d’instruments à vent dont les clés sont nickelées parce que les clients Américains apprécient particulièrement ce métal qui assure la brillance de leurs instruments. Il est certain que le taux de libération d’ions nickel de clés faites en maillechort et plaquées avec du nickel va dépasser le seuil fixé par l’ECHA.
Ces instruments ne sont pas destinés au marché européen, mais ils ne pourraient tout de même plus être fabriqués sur le sol européen !
Et tout ceci s’applique aussi bien aux entreprises qu’aux artisans !
Les conséquences à prévoir
Les conséquences à prévoir avec une telle réglementation sont multiples :
- écrasement des entreprises françaises et européennes sous le poids de la concurrence déloyale des entreprises des autres continents.
En effet, si les entreprises hors UE ne pouvaient plus mettre en vente leurs produits sur le sol européen, elles pourraient tout à fait les vendre par Internet. Les entreprises européennes seraient donc gravement mises en danger par la réglementation sur leur propre sol ;
- le pendant de cette première conséquence est le développement d’un marché parallèle sur le sol européen ;
- enfin une délocalisation des entreprises en dehors de l’Union européenne est à prévoir, s’il n’est plus possible pour eux de fabriquer ni de vendre leurs produits au sein de l’UE. Cette délocalisation s’accompagnant du licenciement des salariés des entreprises – pour information la facture instrumentale française représente au moins 3000 personnes en France – et la perte de savoir-faire français et européen centenaires.
Nos actions
La CSFI et son homologue européen la CAFIM suivent ce dossier de très près depuis plusieurs mois pour alerter les personnes décisionnaires – au niveau de l’UE ainsi que dans les différents pays européens – de l’impact très lourd que l’inclusion des instruments de musique dans cette réglementation aurait sur le secteur musical en Europe.